Guinée/L’unité nationale, la paix ne sont pas des vains mots ( Aïssatou Chérif Baldé ) –

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La junte militaire guinéenne avec une transition politique trompe l’œil compte organiser ce 05 septembre un concert simulacre pour dit-elle préserver la paix et l’unité nationale.

Et cette date marque la venue de la junte militaire guinéenne au pouvoir sur fond d’un putsch militaire, il y a de cela deux ans.

Peut-on à travers un concert organisé avec l’argent du contribuable guinéen préserver la paix et l’unité nationale dans un pays où l’ordre des choses est fortement perturbé; où la junte militaire guinéenne comptable de l’assassinat de 22 jeunes adolescents, préfére briller par une surdité politique en imposant aux guinéens un régime répressif sur fond d’une vision ethniciste du pouvoir ?

En réalité, dans le contexte actuel du pays, préserver la paix à travers l’unité nationale, la justice, instaurer une véritable démocratie et une bonne gouvernance doivent être l’une des pierres angulaires de tout processus de transition démocratique.

En effet, le renforcement de l’unité nationale en Guinée en vue de garantir la volonté de vivre et de bâtir ensemble, tout en tenant compte de la diversité de la société guinéenne (régions, ethnies, cultures, générations, genre, classe sociale, classes intellectuelles, civiles et militaires, religions, etc.) ne doivent pas être des vains mots pour un gouvernement de transition.

Ces termes ne doivent en réalité pas servir d’alibi pour la pérennisation d’un pouvoir pathologique.

Car la paix, la démocratie et l’état de droit ne peuvent tirer leurs fondements que de la liberté, de l’égalité, de la justice et de la souveraineté du peuple.

Mais ces termes demeurent pour le régime actuel que de vains espoirs.

On voit depuis deux ans que l’objectif affiché par la junte militaire guinéenne est d’imposer à la Guinée un pouvoir hégémonique dominant sur fond d’ethnicité et de la politique du ventre pour ainsi continuer à y faire enraciner un État néopatrimonial.

Et pourtant, elle sait pertinemment qu’un tel État est incompatible à la bonne gouvernance, à la Démocratie et ne favorise pas l’unité nationale.

Car l’État neo-patrimonial est le plus souvent source de dissensions intestines qui déchirent les États africains, puisqu’il est le plus souvent porteurs d’exclusion et de violences.

Dans ce type d’État, l’exercice du pouvoir et les considérations économiques personnelles pour le contrôle des ressources de l’État, sont en effet chez nombre d’acteurs nationaux, l’un des principaux enjeux de l’engagement politique et parfois d’ailleurs la seule pour les acteurs politiques guinéens.

Or ce néo-patrimonialisme, auquel se rattachent l’instrumentalisation de l’ethnicité, l’utilisation du népotisme et du clientélisme comme critères de distribution des ressources convoitées, concourt ainsi à éclairer les violence, et à obscurcir le peuple.

À cela s’ajoute le fait qu’un tel État contient en lui des germes d’exclusion et d’affrontements meurtriers.

Les tueries en Guinée juste après la prise du pouvoir par la junte militaire guinéenne est illustratif de cet état de fait.

Pourtant ce genre d’État est non seulement source de décadence mais aussi et surtout incompatible avec la démocratie, la justice, la paix et la bonne gouvernance.

Et si l’ancien légionnaire français Mamady Doumbouya n’était pas le chef d’un tel État, il allait chercher à élever sa vision vers de hauts sommets, en améliorant la performance de sa nation vers des standards plus élevés.

Il allait se fixer forcément les objectifs suivants:

Constituer et promouvoir le renforcement des libertés individuelles et collectives;
Permettre l’émergence d’une société civile forte et la séparation des pouvoirs (exécutif, législatif et judiciaire);
rester attaché aux principes et valeurs d’éthique pour une moralisation financière dans la gestion des biens publics.
Par ailleurs, il aurait pu accorder depuis le 05 septembre 2021 une place prépondérante au renforcement des principes de bonne gouvernance administrative à travers :

le développement d’une politique de coordination des missions et interventions entre les différents corps de contrôle, l’application objective du principe universel de reddition des comptes, y compris en matière d’exécution budgétaire ;
Le renforcement du rôle, des missions et des moyens de la Cour des Comptes, si cours des comptes y’en a;
La généralisation du système d’évaluation des performances de l’administration et de la justice ;
La systématisation des appels à candidature pour certains emplois du secteur public et parapublic;
Enfin, il veillera en tant que leader qui se définit par les résultats et non par les attributs:

au rééquilibrage des pouvoirs au sein de l’Exécutif au profit du Gouvernement ;
au renforcement des pouvoirs et de la légitimité du Parlement;
au renforcement des institutions de la République ;
à la réforme de la Justice et au renforcement de l’indépendance du pouvoir judiciaire.
C’est seulement en atteignant de tels objectifs que l’on peut préserver la paix et consolider l’unité nationale.

En somme, l’unité nationale, la paix, la justice ne sont pas des vains mots. C’est plutôt une responsabilité avec un prix très élevé. Donc, il faut arrêter d’utiliser ce terme à mauvais escient pour asseoir un pouvoir autoritaire et injuste.

Aïssatou Chérif Baldé
African panorama.com