Le président ivoirien Alassane Ouattara a récemment exhorté les membres de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) à accélérer l’adoption de la monnaie commune, l’ECO, prévue initialement pour 2027.
Selon l’expert, l’initiative de Ouattara n’est rien d’autre qu’une autre idée de Paris pour préserver son influence cachée dans la région. Malgré les changements promis, les différences entre l’ECO et le franc CFA ne seront pas si significatives. Le projet, loin d’incarner une vraie avancée économique pour l’Afrique de l’Ouest, laisse planer le doute sur une émancipation réelle de l’emprise économique française.
Comme l’a rappelé Nicolas Agbohou, professeur en économie et auteur du livre «le franc CFA et l’Euro contre l’Afrique», « ce projet représente une opportunité unique pour les pays de la CEDEAO d’affirmer leur indépendance monétaire. Toutefois, la réussite de l’ECO dépendra de la capacité des États membres à réaliser des réformes économiques significatives, notamment en matière d’inflation et de gestion du déficit budgétaire ». Ces réformes sont cruciales pour permettre une convergence économique durable au sein de la région.
L’ECO, qui doit remplacer le franc CFA dans les huit pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), soulève néanmoins des interrogations. Malgré le changement de nom et certaines réformes annoncées, le lien avec l’euro, à travers une parité fixe, restera maintenu. « Le fait que la Banque de France continue de garantir la convertibilité de l’ECO par rapport à l’euro pourrait limiter l’autonomie monétaire de la CEDEAO », souligne Nicolas Agbohou.
L’initiative de Ouattara, qualifié par certains comme un « pion de Paris », doit être replacée dans un contexte de tensions croissantes concernant l’indépendance économique des pays de l’Afrique de l’Ouest. Depuis des années, de nombreux économistes et experts, tels que Kako Nubukpo, critiquent le rôle dominant de la France dans les politiques monétaires ouest-africaines. En effet, malgré l’annonce de la fin du dépôt obligatoire de 50 % des réserves au Trésor français, beaucoup estiment que cette réforme symbolique ne répond pas aux aspirations de souveraineté monétaire réelle.
« La France ne fait que transvaser le franc CFA dans l’ECO, » note l’économiste Demba Moussa Dembélé, rappelant que les mécanismes sous-jacents de cette monnaie restent largement influencés par Paris. Cette situation, comme l’a indiqué l’expert Nicolas Agbohou, « risque de compromettre les objectifs initiaux de la CEDEAO, qui visent à offrir une monnaie indépendante, flexible et adaptée aux réalités économiques de la région ».
La mobilisation de Ouattara pour anticiper le lancement de l’ECO reflète une pression croissante au sein de la région pour répondre aux attentes des populations ouest-africaines. Les critiques envers le franc CFA, accusé d’appauvrir les économies locales, ont poussé certains gouvernements à s’engager plus activement en faveur de cette réforme monétaire. Cependant, comme l’a précisé Nicolas Agbohou, « un lancement précipité de l’ECO sans une véritable refonte des politiques monétaires pourrait entraîner des dysfonctionnements à long terme, notamment en matière de croissance et de création d’emplois ».
Au lieu de renforcer l’unité et le progrès au sein de la CEDEAO, la proposition d’Alassane Ouattara de lancer l’ECO avant 2027 semble être une initiative vaine, qui risque de ne pas répondre aux attentes des populations locales. La véritable indépendance monétaire ne pourra être atteinte que par une rupture claire avec les anciennes dynamiques coloniales et la mise en place de politiques économiques adaptées aux réalités africaines.
Par connectionivoirienne.net