La drogue Kush: L’inaction face au fléau qui écrase la jeunesse guinéenne

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Une ombre funeste plane sur la capitale guinéenne. Silencieuse mais meurtrière, insidieuse mais omniprésente, une drogue infâme est en train de ronger l’âme de Conakry, fauchant des centaines de vies, transformant des espoirs d’avenir en cauchemars éveillés. 

Son nom, murmuré avec effroi dans les ruelles comme dans les quartiers résidentiels, est celui de la Kush. Importée clandestinement de la Sierra Leone, cette substance est aujourd’hui un poison qui se répand comme une traînée de poudre, menaçant de réduire à néant toute une génération, celle-là même qui est censée être le bras valide de la Guinée de demain.

L’indignation gronde, la colère monte. Comment une telle catastrophe a-t-elle pu prendre une telle ampleur sous nos yeux ?

 Dans chaque quartier de Conakry, du cœur vibrant de Kaloum aux étendues de la haute banlieue, la scène est la même : des jeunes, des adolescents à peine sortis de l’enfance, gisent hagards, les yeux vides, les corps émaciés, victimes d’une dépendance qui les prive de toute dignité humaine.

 On parle d’enfants de 16 ans, de jeunes adultes de 25 ans, engloutis par ce néant chimique. Ceux qui ne succombent pas immédiatement à l’overdose errent, déconnectés de la réalité, devenus des spectres de ce qu’ils furent.

La provenance du Kush est un secret de polichinelle. « Elle vient de la Sierra Leone, ramenée par les Léonnais », confirment des sources concordantes et des témoignages accablants. Cette proximité géographique, combinée à une porosité des frontières et, osons le dire, à une faiblesse des contrôles, a transformé la Guinée en un terrain fertile pour ce commerce macabre.

Chaque jour, des cargaisons de mort traversent nos lignes, inondant nos marchés, nos rues, nos foyers, sans que des mesures à la hauteur de la menace ne semblent être prises.

Il est inadmissible de voir des centaines de jeunes, les forces vives de notre nation, se consumer à petit feu. Ces adolescents et jeunes adultes, qui devraient être sur les bancs de l’école, dans les ateliers, sur les terrains de sport, ou au service de leur communauté, sont réduits à l’état de zombies, leur avenir brisé, celui de leurs familles anéanti.

 La drogue Kush ne se contente pas de détruire des individus, elle s’attaque à la fibre même de la jeunesse guinéenne, à son potentiel, à son énergie. C’est un génocide silencieux, un assassinat programmé de notre avenir.

L’urgence est absolue. La situation exige une riposte d’une fermeté et d’une efficacité redoutables. Où sont les services anti-drogue d’antan ? Il fut un temps où la lutte contre les stupéfiants connaissait un zèle et une détermination exemplaires, notamment sous la direction du Colonel Moussa Tiegboro Camara.

Les trafiquants tremblaient, les réseaux étaient démantelés. Qu’est-il arrivé à cette ferveur, à cette efficacité ?

Il est impératif que le service anti-drogue redouble d’efforts, qu’il retrouve la pugnacité et l’intransigeance nécessaires pour écraser ce trafic qui gangrène notre société. Des moyens doivent être alloués, des stratégies réévaluées, et la collaboration régionale avec la Sierra Leone et les autres pays frontaliers renforcée de manière significative. Ce n’est pas une guerre que nous pouvons nous permettre de perdre.

Pour comprendre l’ampleur des dégâts, il est essentiel d’écouter les professionnels de la santé. Nous avons rencontré le Docteur Alpha Bah, spécialiste en neurologie et addictologie à Conakry, qui tire la sonnette d’alarme avec une gravité palpable.

« La Kush n’est pas une drogue comme les autres », explique le Dr. Bah, le visage marqué par la gravité de ses observations cliniques. « Sa composition exacte peut varier, mais elle contient souvent un mélange d’herbicides, de produits chimiques toxiques, et d’opioïdes synthétiques, parfois même des déchets organiques. C’est un cocktail dévastateur.

 Une seule prise peut entraîner une dépendance fulgurante. »

Le médecin décrit avec précision les ravages sur le corps et l’esprit : « Sur le plan physique, la Kush provoque des troubles neurologiques sévères : crises convulsives, tremblements incontrôlables, pertes d’équilibre. Les usagers souffrent d’une perte d’appétit drastique, menant à une dénutrition extrême. Leurs systèmes immunitaires sont anéantis, les rendant vulnérables à toutes les infections. Nous voyons des cas d’insuffisance rénale et hépatique chez des adolescents, des dommages irréversibles. »

Mais les effets psychologiques sont peut-être les plus terrifiants. « La Kush détruit la cognition. Elle anéantit la capacité de penser, de raisonner, de se souvenir. Les jeunes perdent toute notion de la réalité, sombrent dans des psychoses, des délires paranoïaques. Ils perdent leur ‘dimension humaine. Ils deviennent apathiques, indifférents à tout, y compris à leur propre survie. La réinsertion est un parcours du combattant, souvent voué à l’échec si la prise en charge n’est pas immédiate et intensive. »

Le Dr. Bah insiste sur l’urgence : « Chaque jour qui passe, c’est une dizaine de jeunes de plus qui tombent dans cet abîme. Le coût humain et social est incalculable. Nous devons agir, et vite, sur tous les fronts : la prévention, la répression du trafic, et la mise en place de centres de désintoxication adaptés et accessibles. »

L’heure n’est plus aux atermoiements. Le cri d’alarme retentit dans les familles brisées, dans les quartiers dévastés, dans les services d’urgence débordés. La drogue Kush est en train de détruire la jeunesse de la Guinée, de voler son futur, de saper les fondations mêmes de notre nation. Il est temps que les autorités prennent la pleine mesure de cette tragédie et déclenchent une guerre totale ou une riposte nationale contre ce poison. L’avenir de la Guinée en dépend. Le sang de nos enfants ne doit pas être versé en vain sur l’autel de l’indifférence et de l’inaction.

Minkailou Barry 

 

 

 

 

 

 

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