Lamine Guirassy : une sanction precipitée qui interpelle

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La décision de la Haute Autorité de la Communication (HAC) de suspendre Lamine Guirassy, figure majeure du paysage médiatique guinéen, suite à la diffusion d’une fausse alerte sismique sur son compte X, a provoqué une profonde surprise et un sentiment de regret au sein de l’opinion.

Cette sanction, d’une sévérité inédite allant jusqu’à lui interdire l’exercice du métier de journaliste et prononcée sans audition préalable de l’intéressé, soulève de sérieuses interrogations sur le respect des procédures et la proportionnalité de la mesure.

Lamine Guirassy n’est pas un nom anodin dans le journalisme guinéen. Fondateur du groupe Hadafo Médias, il a révolutionné l’information avec des plateformes comme Espace FM, Espace TV, et la célèbre émission « Les Grandes Gueules », reconnue pour sa liberté de ton et son engagement indéfectible en faveur de la démocratie.

En près de deux décennies de carrière, il n’a jamais été épinglé pour des manquements à l’éthique ou à la déontologie journalistique. Son parcours est celui d’un bâtisseur, d’un promoteur de la liberté d’expression en Guinée.

La HAC a qualifié la diffusion de cette fausse alerte de « faute professionnelle grave », s’appuyant sur les textes législatifs régissant la presse.

Cependant, la rapidité avec laquelle cette sanction a été appliquée, sans enquête approfondie ni audition du principal concerné, remet en question les principes fondamentaux de justice et de présomption d’innocence.

Comment expliquer une telle précipitation, surtout lorsque l’on considère l’impact dévastateur d’une telle décision sur la carrière et la réputation d’un homme qui a tant donné à la presse guinéenne ?

Il est crucial de rappeler que les réseaux sociaux, malgré leur puissance, sont également des terrains propices aux erreurs involontaires, voire aux piratages.

Avant de brandir une sanction d’une telle ampleur, il aurait été judicieux de vérifier si Lamine Guirassy était l’auteur conscient et intentionnel de cette publication.

La meilleure façon de le savoir était d’échanger avec lui, même s’il est actuellement loin du pays. D’ailleurs, son silence depuis la diffusion de l’alerte, il y a 24 heures, peut être interprété de diverses manières.

De plus, la publication ne s’est pas limitée à une simple information ; elle a même formulé des mesures à adopter par les populations, alors même que M. Guirassy n’est pas spécialiste en protection civile, ce qui soulève des questions sur la nature exacte de l’erreur commise.

Le fait que M. Guirassy n’ait pas réagi en 24 heures via un média ou une plateforme de réseau social pour donner sa version des faits ajoute à la complexité et au mystère de cette situation.

Par ailleurs, si la diffusion de fausses informations sur les réseaux sociaux constitue une infraction, n’est-ce pas au procureur de la République de s’en saisir, plutôt qu’à la HAC, dont le champ de compétence concerne principalement les médias traditionnels ?

Cette question de la délimitation des compétences et des procédures légales ne peut être éludée.

La suspension de Lamine Guirassy doit être l’occasion d’une réflexion collective approfondie.

Il est impératif de garantir la liberté de la presse tout en assurant la responsabilité des journalistes. Cependant, cet équilibre ne doit en aucun cas se faire au détriment des principes fondamentaux de justice et d’équité.
En ces temps où la désinformation est un défi majeur, il est crucial de renforcer les mécanismes de vérification et de sensibilisation, plutôt que de recourir à des sanctions hâtives qui pourraient être perçues comme des atteintes à la liberté d’expression.

Minkailou Barry 

 

 

 

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