AUJOURD’HUI, 22 Novembre 1970, Invasion de la Guinée par des troupes portugaises

0
88

Novembre 1970, des troupes portugaises, assistées de dissidents guinéens, tentent de renverser le régime de Sékou Touré, de neutraliser les rebelles actifs en Guinée-Bissau et de libérer des prisonniers portugais détenus à Conakry.

L’opération connait un succès mitigé qui isole davantage le Portugal sur la scène internationale.

En 1968, la guérilla en Guinée-Bissau avait lancé 147 attaques sur les forces portugaises et prit le contrôle des deux tiers de la colonie.

Le Portugal devait maintenir 30 000 soldats pour la combattre. Le général Antonio Spinola réussit au cours des deux années suivantes à regagner le terrain perdu, après une offensive fructueuse sur la frontière avec la Guinée et le Sénégal.

Pour détruire les bases des rebelles en Guinée, le Portugal décide en 1970 de lancer une attaque amphibie contre la capitale, Conakry.

Exécutée par quelques centaines d’hommes, dont des dissidents guinéens, «l’opération verte» doit permettre de prendre le contrôle de la mer et du ciel, de libérer les prisonniers de guerre portugais, ainsi que de détruire le quartiers général de la guérilla et, si possible, capturer son chef, Amilcar Cabral. De plus, la force d’intervention doit servir de fer de lance pour un mouvement visant à renverser le régime de Sékou Touré.

Débarquées dans la nuit du 22 novembre, les troupes détruisent rapidement la maison d’été du président, mais sans capturer ce dernier. Ils font aussi sauter des armes et des véhicules et s’emparent du quartier général de la guérilla. Cabral, qui est alors en Europe, leur échappe. Ils échouent aussi à prendre l’aéroport et à détruire les avions MIG. L’opération coûte la vie à quelque 500 Guinéens et à trois membres des commandos.

Identifié comme le responsable de l’opération, le Portugal est condamné par le Conseil de sécurité comme une menace à la paix en Afrique. Cuba et l’Union Soviétique en profitent pour augmenter leur aide militaire à la Guinée et à la guérilla anti-portugaise. Le pouvoir de Sékou Touré, qui déclare la loi martiale et lance une vaste campagne de répression, sortira renforcé de cette opération.

Répression en Guinée
La réaction à l’agression portugaise de novembre 1970, le président guinéen Ahmed Sékou Touré procède à une sévère répression. Les personnes opposées au régime sont accusées de subversion, arrêtées, et soumises à des procès secrets qui, dans certains cas, sont suivis par des exécutions sommaires.
Entre 1958 et 1970, Sékou Touré est la cible d’une demi-douzaine de complots, de tentatives de coup ou d’assassinat. Celui-ci est à la tête d’un régime autoritaire dont les politiques entraînent l’exil de centaines de milliers de personnes. L’invasion par des troupes portugaises, en novembre 1970, renforce sa méfiance et provoque une nouvelle vague de répression. Le président y voit la preuve d’une conspiration contre son régime, soutenue selon lui par des éléments intérieurs et extérieurs -dont l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord- , à cause de son support à la guérilla en Guinée Bissau. Il rompt les liens avec le Sénégal et la Côte d’Ivoire, puis forme un comité de 10 personnes provenant des hautes instances militaires, qu’il charge de gouverner le pays par décret. Encadré par des membres loyaux du bureau politique, le haut commandement militaire supervise les arrestations et ordonne, souvent sans procès, les exécutions d’anciens membres du gouvernement ou des forces armées. Pour sauver leur tête, des membres de l’administration et des militaires, comme le général Lansana Diané, se rangent derrière Sékou Touré. Un grand procès national se tient le 23 janvier 1971. Après cinq jours, le tribunal révolutionnaire suprême ordonne l’exécution de 29 personnes dont les corps sont ensuite exposés sur les places publiques. Le tribunal prononce aussi 33 condamnations à mort in absentia et plusieurs sentences sévères. Des personnes incarcérées seront officiellement libérées, mais d’autres disparaissent dans les prisons ou sont sommairement exécutées. Parmi elles, on retrouve plusieurs anciens ministres et membres de l’appareil gouvernemental. Ces purges permettront au président de renforcir son contrôle sur le pays.
Les informations précédentes renvoient précisement à la date de l’événement. Le niveau de démocratie est établi à partir des travaux de l’équipe de Polity IV. L’indice renvoie à la démocratie institutionnelle. Les noms des gouvernants sont établis à partir de nos bases de données les plus récentes. Là où on ne trouve aucun nom pour chef du gouvernement, il faut conclure que le chef de l’État est aussi, et sans intermédiaire, le chef du gouvernement, ce qui est le cas des systèmes présidentiels classiques (les États-Unis par exemple).

Perspective Monde