L’autre de ces « observations » est un docteur en droit public économique de l’Université Paris1 Panthéon-Sorbonne. Jusqu’en 2019, Dr Galissa Hady Diallo enseignait le droit administratif et constitutionnel à Paris1. Essayiste, il est également titulaire d’un master en droit des affaires obtenu à l’Université de Nice et a notamment travaillé dans les Directions Conformité de grandes multinationales spécialisées en Banque-finance et en assurance. Il est Gérant du Cabinet Loi & Lumière.
Lisez !
Il faut d’emblée préciser que la confusion ayant entouré la sortie d’abord du rapport sur l’Avant-projet avant le projet lui-même n’a pas rendu service à la clarté et l’intelligibilité requis pour un tel exercice. L’Avant-projet n’a été officiellement publié que quelques jours après la sortie du rapport qui avait déjà suscité moult réactions en raison d’un certain nombre d’incohérences et d’incompréhensions. Lors de la conférence de presse organisée à ce sujet par le CNT et son président le 07 août 2024 à l’Hôtel Kaloum, j’ai pu entendre certaines précisions. Mais dans le même temps, volontairement ou non, certaines réponses avaient esquivé d’autres questions et non des moindres. L’ensemble de mes commentaires se feront alors sous certaines réserves.
Qu’est ce qu’un avant-projet de constitution ? Pour le dire aussi clairement et tout bonnement, il s’agit d’un « avant goût ». Un extrait se focalisant sur des points que les auteurs peuvent estimer saillants dans l’optique d’entamer des échanges et des discussions autour du projet de constitution lequel, une fois entériné par les conseillers nationaux, sera considéré comme constitution et soumis au référendum avant promulgation par le président de transition pour, enfin, pouvoir être considérée comme telle.
Dès lors, et avec toute la prudence que cela requiert, il me paraît important d’entamer ces observations par une petite note méthodologique (I) avant d’aborder celles qui me semblent plus ou moins pertinentes (II) et finir par celles qui le sont moins car appelant discussion voire suppression en raison de leur impertinence dans un texte aussi symbolique qu’une constitution (III).
I- Note pédagogique :
À mon sens, bon nombre de réactions et d’incompréhensions n’ont été que la résultante de la forme adoptée par les auteurs dudit Avant-projet. Ils auraient dû, au nom de l’intelligibilité, présenter les points selon que l’on soit en présence :
ü De dispositions constitutionnelles ;
ü De lois organiques devant résulter de ces dispositions ;
ü De réformes législatives nécessaires (en cas d’adoption), donc de lois ordinaires.
Or, et comme cela est connu chez les juristes, la forme déterminant presque toujours le jugement réservé au fond, ils se sont contentés de faire un listing dans le rapport. En l’occurrence, beaucoup d’insuffisances formelles ont influencé la lecture réservée aux formulations substantielles.
Je formule tout cela donc en gardant en permanence en tête qu’on parle bien d’une constitution, loi fondamentale, suprême, censée être ni bavarde, ni explicative comme le croient certains, mais incarnant une impulsion globale et dont la simple évocation doit susciter l’attention, la grandeur.
NB : Dans les lignes suivantes, le contenu tel qu’il résulte d’une lecture combinée du rapport et de l’Avant-projet sera numéroté, tandis que mes observations seront entre parenthèses et précédées de l’abréviation du mot commentaire (CM).
II- Des propositions paraissant pertinentes
A- Le Préambule, partie intégrante d’une constitution
1- La réaffirmation sinon l’insistance sur l’attachement du peuple de Guinée à la primauté et au respect de l’ordre constitutionnel ;
2- L’affirmation du peuple de Guinée de son rejet de toute forme d’accession, de maintien et de transmission inconstitutionnels du pouvoir…
Commentaire : Ajouter : « et de son exercice antirépublicain ». Tout ce qui est listé par la suite n’est que la résultante de cela. Donc nul besoin de parler de régionalisme, d’ethnie ou d’autre chose de ce sillon.)
3- De la souveraineté inaliénable du peuple sur toutes les ressources naturelles et les richesses nationales.
- Je dis pourquoi pas mais cela me paraît tellement évident qu’il n’est pas si nécessaire de le souligner. Mais si une connotation constitutionnelle apporte son renforcement, ce serait tant mieux. Il faudra toutefois intégrer cet aspect dans la sous section « Souveraineté » et non dans le préambule du préambule.)
4- L’engagement de l’État à garantir la participation des organisations de la société civile et des partis politiques à l’éducation civique des citoyens.
- (Une très belle affirmation sur le papier, mais quid de la réalité des défis tant exogènes qu’endogènes auxquels ces acteurs sont confrontés depuis toujours ? Quid de leur responsabilité partagée sur ce sujet ? )
5- L’érection de la préservation de l’environnement et des écosystèmes comme principe fondamental de l’État.
- (Il s’agit là d’un élément qui doit concentrer l’attention singulière de tous. Même si je trouve qu’on peut aller plus loin en identifiant certaines des composantes de cet écosystème et leur doter unepersonnalité juridique et des droits inaliénables à la préservation et d’entretien pour qu’elle ne soient plus jamais délaissées sous peine d’engager la responsabilité de l’État, des élus locaux, des acteurs économiques ou de tout autre acteur concerné, y compris par voie de pétition. Je pense ici au Parc de Badiar, à nos Forêts notamment celle de Ziama, au Bassin fluvial du Foutah Djallon, aux sources fluviales de la Basse Côte ainsi qu’à la préservation du fleuve Niger en Haute Guinée contre un ensablement érosif avancé).
- 6- L’affirmation de l’inviolabilité et la sacralité de l’être humain et de sa dignité (doit être la première des affirmations de la sous-section « Droits civils et politiques « .
Pour ma part, je ne retiendrai pas, comme l’indique le rapport, la notion de « reconnus » parce qu’on ne peut faire autrement que de reconnaitre tous les droits civils et politiques.)
7- La consécration du droit à l’intégrité physique de toute personne et la proscription.
8- La réitération du droit au cortège et de manifestation.
(Là aussi, était-il nécessaire d’ajouter le caractère « pacifique ». Absolument pas. Le droit ne reconnait par le truchement de l’ordre public que des manifestions pacifiques. Nul besoin de le mentionner ici).
9- L’interdiction de contraindre quiconque au déplacement forcé et à l’exil.
(Nous devons sur ce point également s’interroger collectivement et empiriquement. Quelle en est la réalité dans le pays ?)
10- La réaffirmation des deux conditions substantielles à l’expropriation : utilité publique et indemnisation juste et préalable.
(Mais en amont, il faudrait mettre fin au laxisme face à ceux qui cèdent ou vendent indûment des biens publics de l’État en toute connaissance de cause. Le mal doit être soigné à la racine).
11- La garantie du droit d’accès à l’information publique.
(Il faudrait rendre délictuel toute vente ou rétention d’une information publique non couvert par le sceau d’une restriction légale–confidentialité ou grade–. L’accès à l’information publique est si important qu’il doit être corrélatif à la fondamentale et indispensable facilitation de l’accès au juge.)
12- L’engagement de l’État à protéger les citoyens contre la discrimination dans l’accès au logement.
(Bien avant cela, il me paraît essentiel que l’État veille à règlementer les prix à travers un plafonnement des logements au regard du niveau de vie de la population. Oui, les discriminations peuvent exister mais la responsabilité de certains locataires ne doit en aucun cas être occultée. De toute les manières, tout ceci est du domaine de la loi, laquelle délimiterait les compétences entre le national et le local. Car les communes devraient avoir un grand rôle à jour sur ce sujet.)
13- Protéger les enfants et les jeunes contre l’exploitation, l’abandon, la délinquance, l’abus sexuel, la maltraitance, la traite humaine, l’exode rural et la migration irrégulière.
(Il faudra, au travers de la loi, aller plus loin en rendant effectif l’interdiction du travail des enfants. Surveiller et sanctionner également les stages non rémunérés et interminables des jeunes aussi bien en entreprise que dans le secteur public.)
14- Le devoir de tout citoyen de défendre l’intégrité du territoire national et de s’opposer à toute forme d’accession, de maintien et de transmission inconstitutionnels du pouvoir.
(Pourvu qu’on lui garantisse une protection juridictionnelle suffisamment indépendante pour ne pas y laisser sa vie ou sa dignité.)
B- Les Instituions, socle indispensable de la fiabilisation de l’État
1- Création d’un Sénat (article 41)
(La mise en place d’un Sénat dans l’ossature parlementaire de notre pays est une idée que je défends depuis 10 ans maintenant. Elle a été reprises dans les propositions de@PerspectivesGuinée à l’endroit du CNT. À l’inverse de ce que beaucoup estiment comme une institution budgétivore de plus–ce qui pourrait être le cas si on est minimaliste et fourvoyant–, je la crois nécessaire si tant est que l’on veuille mettre effectivement nos territoires et nos autorités coutumières sous la coupole institutionnelle et dans un sillage républicain. Pourvu également que l’idée soit expliquée clairement par les bonnes personnes, avec les bons arguments. Faire croire à nos compatriotes qu’il s’agira d’un syndicat ou d’une chambre de tontine pour des vieux retraités est un très mauvais chemin. D’autant plus qu’on parle de catégories socioprofessionnels de la Nation. Il faut que les potentiels sénateurs aient un programme, fassent campagne et convainquent de leur capacité à être dans une telle assemblée.
À mes yeux, les principales justifications à mettre en avant sont, entre autres, les suivantes :
– Un sénat permettrait de mieux représenter nos territoires et leurs spécificités en termes de besoin local ;
– Un sénat responsabiliserait et initierait nos « sages » à l’exigence de l’élaboration d’une loi, à la pensée globale et complexe impliquant des intérêts antagonistes à concilier. Ce qui aurait pour effet de leur permettre d’intégrer que le pays est plus fort lorsqu’on ne rende pas justice par renoncement, marchandage ou pardon mal placé quant la société subit un préjudice consécutif à des infractions. Un bout du tissu social ne sera jamais représentatif de l’ensemble …
– Un sénat, dans ses compétences législatives exclusives ou partagées avec l’AN, pourrait rendre plus efficace le contrôle de l’action gouvernementale. Même s’il faut faire extrêmement attention quant aux critères de candidature pour y siéger. Nous y reviendrons.
– Un sénat ne doit pas être nécessairement pléthorique. Le nombre peut être limité quitte à l’amender au fur des mandatures.
– Un sénat dont le budget de fonctionnement est voté et connu de tous est largement plus contrôlable que nos coordinations régionales et d’autres autorités coutumières qui reçoivent l’argent public du simple fait de leur statut avec ni traçabilité ni redevabilité.
– Avec des critères pertinents d’éligibilités et un processus transparent d’élection, il serait extrêmement difficile qu’un parti au pouvoir puisse avoir une majorité tant au Sénat qu’à l’AN. Cela pourra donc réduire drastiquement la connotation (souvent réelle) de chambre d’enregistrement qui colle à la peau de notre organe législatif. Cela facilitera également l’ouverture, en cas de nécessité, de commissions d’enquête, une chose plutôt rarissime dans notre pays.
– Un sénat limiterait le vote en l’état des textes proposés à l’AN, notamment ceux du gouvernement. Ce qui implique et exige qu’on ne laisse y entrer, si tant est que l’on tienne à sa crédibilité, que des profils aussi bien représentatifs de nos terroirs et nos autorités coutumières que des gens initiés aux enjeux et capables d’y réfléchir. Exigence et non nivellement par le bas. Cela est d’autant plus indispensable qu’on envisage de confier au Sénat la validation ou l’émission d’avis sur certaines nominations.
2- L’obligation de renoncement dans le délai requis à une autre nationalité autre que la nationalité guinéenne (car incompatible avec la fonction de président de la République) (article 78).
(Une telle renonciation se doit d’être définitive et son manquement doit faire l’objet de poursuite judiciaire. Toutefois, une telle limité n’aura de sens que si, dans l’exercice du pouvoir, notamment aux sphères les plus élevées, le pays est préservé contre toute atteinte à la souveraineté et à la sensibilité des certaines informations parfois imprudemment fournies à des étrangers.)
3- Rendre au premier ministre son pouvoir de nomination aux emplois civils (article 84).
(Il doit en être le cas également et ce de manière plus poussée pour les ministres dans la proposition des membres devant composés leur cabinet ainsi que la nomination des directions et services. Aussi, pourquoi ne pas redonner au PM, le pouvoir de nomination à certains emplois militaires en tant que premier responsable de l’Administration ?)
4- S’agissant des institutions juridictionnelles, toute personne peut saisir directement, par voie d’action, la Cour constitutionnelle de l’inconstitutionnalité d’une loi (article 143).
5- Pour les institutions d’appui à la gouvernance démocratique. (article 172 et s.)
(La Commission dite nationale pour le développement peut conjointement être une fausse bonne idée. Son institution ne me parait pas nécessaire car même si l’idée est séduisante, faudrait-il encore que cette formulation sied à l’institution qui la sous tendrait. Je pense qu’il faudrait plutôt tendre vers la création de fonds souverains alimentés par les différents revenus ministères et autre pour financer l’agriculture intensive et durable, l’éducation et les infrastructures. Du moins en garantir les fonds. Attention toutefois au risque de redondance avec des institutions déjà existantes notamment au sein des ministères sauf à les fusionner. Et tout cela peut résulter d’une loi, il n’est pas nécessaire d’encombrer la constitution à ce sujet.)
6- Idem pour la commission dite nationale de l’éducation civique et des droits de l’Homme (art. 177 et s.)
7- Sur l’Organe technique indépendant en charge de la gestion des élections. (art. 180 et 181).
(Sous réserve de ce qu’en diront les spécialistes de la question électorale, je pose la question de savoir en quoi serait-il différent de la CENI et comment éviterait-il les insuffisances soulignées jusque là et l’aune de nos « prouesses » électorales ?)
C- Des titres spécifiques
1- L’administration publique. L’affirmation de son caractère apolitique, de sa neutralité et de son impartialité est bien. (art. 185).
(Sans accès facilité et visible au juge administratif cela reste un vœu pieux. C’est d’ailleurs pour cette raison que la formulation selon laquelle « nul ne PEUT la détourner à des fins personnelles » devrait être nul ne DOIT car la réalité est qu’elle est souvent sinon toujours détournée à des fins personnelles.)
2- L’organisation territoriale (art. 187 et s.)
(Des provinces pourquoi pas pour combler le basculement des régions dans la décentralisation (loi2016). Néanmoins, compte tenu de la superposition souvent inutile et pesante entre les préfets et ces dites provinces ne me paraissent pas utiles. Ce serait une strate administrative de trop. Aussi, faut-il noter la contradiction qui, au lieu de rendre effective la décentralisation des régions comme le voulait la loi de 2016, cherche à ériger des provinces en collectivités. C’est d’autant plus contradictoire qu’il est affirmé à l’art. 93 que les régions font partie de la conférence des élus locaux où les conseillers régionaux sont présents. Par ailleurs, l’art. 111 indique que « Les deux tiers (2/3) des Sénateurs sont élus par le corps électoral constitué des conseillers régionaux et communaux »).
3- Les collectivités décentralisées bénéficient d’une part des ressources fiscales nationales…(art. 190).
(Si cela peut soulager le budget local, une telle ouverture pourrait avoir son utilité mais que les collectivités lèvent déjà avec effectivité l’impôt local et qu’elles soient intraitables,erga omnes, dans l’exercice effectif de leur compétence, qu’elles n’aient pas peur de recourir au juge en cas de conflit de compétences, qu’elles démontrent lutter efficacement contre le détournement soit par elles, soit par d’autres, des fonds qui leur sont légalement attribués.)
III- Des propositions convoquant discussion, doute voire impertinence et suppression pure et simple
A- Au sein du Préambule
1- L’affirmation du peuple de Guinée de son attachement à la fraternité, au dialogue, à la tolérance et aux moyens de règlement pacifique des conflits.
(Oui au règlement pacifique des conflits, mais c’est tant que cela ne dépouille pas la fonction judiciaire de sa substance. Or, c’est ce qui est souvent le cas dans notre pays. Il faut affirmer d’abord le règlement judiciaire avant celui fondé sur d’autres types qui demeurent, à mon sens, non pas une alternative mais une voie complémentaire à l’égard de la justice institutionnelle. Il est inquiétant de constater qu’un pan important du laxisme attribué à la justice de notre pays vient de là. Il faudrait y remédier, progressivement mais effectivement.)
2- Sous-section Souveraineté. L’affirmation selon laquelle tout parti politique a l’obligation d’être implanté sur toute l’étendue du territoire national.
(Une telle exigence me paraît irréaliste et peut-être même antidémocratique. Autrement, quid des partis politiques dont l’impact et l’engagement n’ont qu’une vocation locale dans le cadre d’une décentralisation efficace notamment ? Exiger que des partis dont l’ambition n’est pas nationale mais qui comptent influer sur la vie publique locale revient à instaurer une sorte de pluralisme censitaire. On peut l’exiger aux partis qui aspirent à gouverner l’ensemble du pays et non à ceux qui n’ont que des ambitions locales voire même rurales, villageoises. Faire vivre la démocratie locale est un gage de la performance de celle nationale car elle n’en est que la résultante.)
3- L’interdiction qu’un quelconque parti politique ne s’identifie à une ethnie, à une région, à une religion ou à une quelconque communauté.
(Là aussi, il n’y a nul besoin d’interdire à un parti de s’identifier à des singularités telles que l’ethnie ou la région dès lors qu’on insiste sur le caractère républicain des acteurs nationaux et locaux. Insister autant sur l’ethnie dans nos textes de loi revient simplement à une certaine incitation. Le critère républicain englobe tout le reste. Le juge, y compris d’office, les instances régulatrices ainsi que les citoyens doivent être là pour y veiller.)
(Il en est également ainsi de la notion d’inclusion, tant au sein des partis politiques qu’au sein de l’administration, sur laquelle on insiste trop souvent alors même qu’il suffit d’être intraitable dans l’appréciation du critère de compétence ainsi que de celui relative à la neutralité et l’impartialité de l’Administration.)
(En outre, le juge doit faire son travail, sur saisine et, s’il le faut, d’office le temps de l’instauration et l’encrage de la pratique. S’agissant d’ailleurs des partis politiques, l’on ne peut leur exiger de sacrifier, comme c’est le cas aujourd’hui, le critère d’exigence républicaine et de la nécessité du débat au nom d’une inclusion (souvent ethnique, il faut le dire) qui nous a produit des partis qui cherchent à tout prix à faire valoir leur diversité ethnique ou régionale au détriment d’un programme de société et de vision. À un moment donné, faudrait-il entièrement faire confiance au discernement des Guinéens qui, le moment venu, compareront eux-mêmes les différentes offres politiques et voteront pour celle qui répondrait le mieux et de manière personnelle à l’aspiration de chacun. Donc, inclusion d’idées plutôt que la morale d’une inclusion de façade.)
4- L’instauration de la candidature indépendante à toutes les élections, avec pour modalité le parrainage des candidats par les électeurs.
(Généraliser de la sorte les candidatures indépendantes à toutes les élections me paraît également inadéquat face à l’exigence de clarté que posent les besoins de notre pays. C’est pourquoi cela me semble très discutable surtout pour la présidentielle alors même que la maturité politique et les modalités d’exercice démocratiques ne sont pas acquis. À la limite, devrions-nous l’expérimenter pour les élections locales d’abord, les législatives par la suite. Si les résultats sont concluants, passerions-nous à la présidentielle. D’autant que pour les législatives, une AN disséquée ne conduit, sauf à être d’une maturité politique élevée, qu’à des blocages, des cooptations et des manipulations. Les négociations entre structurent me paraissent mieux nous convenir pour le moment, le temps d’une maturation.)
5- Le renvoi à une loi organique d’orientation linguistique de la détermination des langues qualifiées de nationales et les modalités d’application du présent article.
(Il est tout de même assez curieux de ne pas entendre parler de la sauvegarde de noslangues minoritaires, menacées. Cela doit être une priorité. La force des choses fait que les autres langues ne sont pas menacées. Tandis que nous avons des langues minoritaires qui risquent de disparaître. Si nous les laissons mourir, nous aurons la responsabilité coupable d’avoir volatilisé une partie de l’âme de notre nation.
6- La gestion rationnelle, transparente et équitable des ressources naturelles pour le bienêtre des populations.
(Ces vœux pieux doivent être la traduction d’une pratique publique à travers une administration compétente et performante, des processus clairs et exigeants et non des déclarations constitutionnelles. Le rôle des acteurs doit être clairement distingués et scrupuleusement observés selon que l’on soit acteur ou contrôleur et le dernier mot doit revenir à la justice avec possibilité de saisine pour tout ayant intérêt.)
7- La promotion de la participation des Guinéens établis à l’étranger.
(Cela doit également être un processus et pratiques institutionnels, une véritable politique. Un pôle national de valorisation des compétences inclurait toute catégorie confondue. La MAMRI pourrait s’élargir dans ce cadre là.)
B- Le citoyen dans la constitution
1- S’agissant des droits civils et politiques au sein desquels sont inscrits l’enseignement et la vulgarisation de la constitution.
(Nul besoin d’inscrire cela dans une loi. Il faut donner les moyens aux écoles, aux facs de droits, au monde universitaire et renforcer les modalités d’évaluation de l’éducation civique dans les examens nationaux.)
2- La prescription du caractère prioritaire de l’éducation nationale.
(A-t-on besoin d’une loi pour que cela soit connu et que les politiques y convergent ?)
3- La garantie par l’État d’une allocation budgétaire conséquente au secteur de la santé, dans les conditions déterminées par la loi.
(L’accès oui, mais surtout le traitement ainsi que le respect de la durée légale des stages selon les domaines que l’on soit en entreprise ou dans le secteur public. Sur ce point aussi, on a simplement besoin d’appliquer la législation existante.)
4- Le droit de la famille à la protection de l’État. Sur ce point le rapport (avant projet) dit que « La garantie par l’État du droit, à partir de 18 ans, pour un homme et une femme, de se marier sans aucune discrimination fondée sur l’ethnie, la religion, la nationalité, la couleur de la peau ».
(Il s’agit là d’une proposition ne contenant aucun intérêt législatif.L’État n’a pas à s’immiscer dans les sentiments des uns et des autres. Quelle banalité que de rappeler qu’on tombe amoureux selon nos cœurs et non parce qu’une loi l’a dit. L’État n’a à garantir ni l’amour ni le mariage à qui que ce soit. Si par cette formulation, ils entendent parler du mariage mixte entre communautés de notre pays, je crois pouvoir dire que certains de nos parents n’ont pas attendu un tel texte pour le faire. Il y a une mixité partout. À un certain niveau, il ne faut pas ridiculiser nos textes de loi qui le sont déjà assez en raison d’une inapplication effective. De grâce !)
5- L’accès des personnes en situation de handicap aux moyens de transport public.
(Il y a de quoi sourire car le défis est aujourd’hui l’accès aux transports publics de tous les Guinéens. Notre pays manque encore de politique viable de mobilité publique. Donc nécessairement, une telle politique inclura les personnes à mobilités réduites.)
6- Le devoir des enfants d’obéissance, de soins et d’assistance à leurs parents.
(Avons-nous besoin de consacrer cela. Même dans l’état actuel des choses, cela se fait selon nos traditions et cultures. Attention à vouloir institutionnaliser une pratique déjà pénalisante pour bon nombre de jeunes (fils) en les culpabilisant vis-à-vis de la situation de leurs parents. Aujourd’hui, nous avons une jeunesse énergique dont il faut libérer, aider et soutenir le talent et non venir insister sur des responsabilités qu’elle assume déjà et dont elle ne devrait s’occuper si ce n’est raisonnablement.)
C- Les institutions dans la structure constitutionnelle
1- Les institutions gouvernantes. ((art. 41-1).
(Cette notion est impropre, j’espère qu’elle ne sera pas inscrite comme telle dans la constitution. Le parlement ne gouverne pas, cela relève d’un sens basique du droit.Je pense que l’ossature classique consacré est non seulement plus audible et pédagogique et surtout plus correcte. Au lieu d’intégrer le parlement dans une formulation floue le faisant passer pour une institution gouvernante, il faut plutôt rester sur le triptyque : Pouvoir exécutif, pouvoir législatif et pouvoir judiciaire.)
2- La cour spéciale de justice (art. 41-2).
(Je ne trouve pas non plus convenable dans l’état actuel d’ineffectivité judiciaire d’instaurer ou de réinventer une cour spéciale de justice. Que les dirigeants soient attraits comme tous les citoyens à l’exception du président de la république qui, une fois son mandat terminée, sauf en cas de haute trahison, sera jugée pour les faits commis pendant son exercice du pouvoir. )
3- Le critère d’âge pour la présidentielle. Le texte dit qu’il faut « être âgé de 35 ans, au moins et de 80 ans, au plus ». (art. 45).
(Il faut espérer qu’une telle formulation ne sera pas inscrite en l’état dans la constitution. Car selon que la virgule est placée avant ou après les « au moins, au plus », nous ne sommes pas dans la même configuration. Aussi faut-il noter qu’on ne peut simultanément être âgé de 35 et de 80 ans.)
4- Sur les pouvoirs du président de la République. Lui conférer les moyens de gouverner dit-on dans le rapport, mais notion introuvable dans l’Avant-projet (et c’est tant mieux).
(La question juridique est de savoir s’il gouverne ou s’il préside. Alors présider ou gouverner ? Ou bien les deux à la fois, auquel cas quelle place pour le PM, chef du gouvernement ? D’autant dans la sous section suivante, il est fait état de son rôle d’arbitre. Alors président gouverneur ou arbitre ?)
5- Soumission de la nomination par le Président de la République aux fonctions de Premier ministre et de membres du gouvernement à l’avis préalable du Sénat consécutif à une séance d’audition à huis clos des personnes proposées (art. 66).
(Attention à ne pas donner au Sénat embryonnaire un pouvoir disproportionné, susceptible de bloquer le pays. Sauf à travailler sérieusement sur les critères d’éligibilité. Sa composition doit être stricte et enracinée dans le maillon institutionnel…Il ne faudrait pas prendre le risque de demander à des sages—en cas de leur prédominance–de décider si tel est premier ministrable ou pas sans qu’ils soient en mesure de jauger les exigences politiques et de compétences. On ne désigne pas un PM au feeling, par affinité ou, comme cela peut arriver, recaler un profil compétent pour des raisons interpersonnelles ou subjectives.)
6- Concernant les verrous afférents à la révision de la constitution (art. 198 et s.).
(Le président du CNT en a évoqué 14 avec entre autres l’exigence de la majorité des 2/3 du parlement, l’avis préalable du conseil constitutionnel ainsi qu’une participation minimale de 50% des électeurs inscrits, pour la validité du référendum. Cependant, en attendant de savoir les autres verrous, faudrait-il noter qu’avec des juges jouant réellement leur rôle nul besoin de tout cela. Le risque est qu’il est tout à fait possible, comme cela est de coutume dans notre pays, que le président détourne ou manipule la composition de la juridiction constitutionnelle, que les 50% des électeurs soient instaurés avec des manipulations de chiffres, etc. Tout cela pour dire qu’aucune loi instaurée par des Hommes n’est à l’abri de contournement par d’autres Hommes. Le tout est de faire jouer implacablement le rôle du juge et de miser sur l’intégrité des Hommes en sanctionnant les manquements. L’intégrité des Hommes et l’audace, normalité devrais-je dire, des juges. Ni plus ni moins.)
7- Missions, pouvoirs et avantages du PM (art. 80 et s.).
(Est-il nécessaire d’exiger un discours de politique générale devant le Parlement en congrès « conseil » s’il n’engage pas sa responsabilité par un vote de confiance ? Pas besoin de le dire si les choses vont continuer comme elles sont jusque là. Quant à ses avantages ou ceux des anciens PM, il faut préciser que cela est du domaine de la loi.)
D- Le pouvoir législatif
1- Concernant les candidatures indépendantes à l’AN (art. 106 al. 3).
(Il faudra être vigilent sur la nécessité d’avoir une assemblée responsable. Sans structures politiques devant organiser les avis des uns et des autres, il y aura un fort risque de dislocation et des votes incohérents selon les humeurs et les affinités pas nécessairement politiques mais subjectives.)
2- Mode de scrutin. Les sièges non attribués au quotient électoral sont répartis à la plus forte moyenne au profit des candidatures des femmes ou des personnes en situation de handicap (art. 106 al. 2).
(L’inclusion des femmes et des personnes en situation de handicap compétents pourquoi pas mais Attention au mandat impératif !)
3- L’Assemblée nationale vote seule la loi dans les diverses matières définies aux articles 116 et 117, sous réserve de celles qu’elle partage avec le Sénat conformément à l’article 113 (art. 107).
(Sommes-nous sur ce point obligés de faire comme ailleurs ? Innovation et adaptation à l’initiation du Sénat sur la responsabilité législative. C’est cela qui doit être l’esprit. N’oublions pas que nous sommes en passe d’intégrer des autorités coutumières dans un sillage législatif. Plus on les confrontera à la difficulté de l’élaboration des lois et de la nécessité de prendre en compte des intérêts et des sensibilités différents, mieux ils sauront à quel point il était contraire à l’esprit républicain de dépouiller les institutions de leur rôle dans la conduite de la nation.)
4- L’âge de 40 ans pour l’éligibilité au Sénat (art. 110-c.)
(Une telle tranche d’âge me semble arbitraire et incohérent. Pourquoi pas le même pour l’accès à l’AN ou à l’éligibilité présidentielle ? Ni gérontocratie, ni jeunisme, compétence et probité. Peut-on disposer d’une haute qualification avant 40 ans ? Oui.)
5- Les fonctions de Sénateur sont incompatibles avec l’exercice de toute activité au sein d’un parti ou d’un mouvement politique (art. 110 al. 3).
(Une telle brèche est très critiquable. Pas de tontine, ni de chambre vidée de son sens encore une fois. D’autant que, selon le projet, elle est amenée à aviser la nomination du PM ou à d’autres hautes fonctions. Incohérence !)
6- Le Sénat contribue à la promotion de la paix sociale et de l’unité nationale. À ce titre, il contribue à la prévention et à la gestion des conflits entre les différentes couches de la Nation et au renforcement du dialogue inter-guinéen (art. 113).
(Attention, cela ne doit en aucun cas se faire au détriment d’une culture ô combien difficile de judiciarisation des différends. Tout au contraire. L’idée même, à mon sens, de la mise en place du Sénat est d’intégrer les institutions coutumières dans le sillage institutionnelle et non de continuer à couper l’herbe et rendre inaudible le processus judiciaire. Quand la société est lésée, cela ne se négocie pas.)
7- Si la commission mixte ne parvient pas à l’adoption d’un texte commun, le Gouvernement peut demander à l’Assemblée nationale de statuer définitivement (art. 116 al. 4).
(Peut ? Doit ? Après combien de temps de discussion et selon quelle nature de loi ?)
8- Moyen d’action de l’AN sur le gouvernement. La motion de censure est déposée suite, soit à un désaccord persistant (à quantifier par qui ?), soit suite à l’insuffisance notoire de résultats dans la mise en œuvre de la feuille de route assignée au Premier ministre par le Président de la République (art. 134 et s.).
(Comment et par qui apprécie-t-on ce caractère notoire et même l’insuffisance ?)
9- Moyens d’action de l’exécutif sur l’Assemblée nationale (art. 136).
(En ce qui concerne ladissolution de l’AN, il faut en modérer voire raréfier l’usage car dans un pays où les élections ne sont pas en totalité financées par l’économie nationale, c’est un pouvoir dont la mise en œuvre doit être réduite, stricte et même une seule fois dans une législature, sinon chaque dix ans.)
E- Les institutions juridictionnelles.
(Encore une fois, l’on ne touche pas l’organisation judiciaire qui, pour ma part, constitue un frein non seulement à l’accès au juge mais également et surtout à l’édification d’une culture de l’état de droit par la contestation devant le juge administratif, de par sa visibilité, des actes posés par l’exécutif et dont la légalité est susceptible d’être contestée.
1- La nomination, par décret, des membres de la Cour constitutionnelle intervient à la suite de l’avis favorable du Sénat (art. 146).
(Pourquoi ne tranche-t-on pas la question de nomination du président de la Cour ? le rendre éligible par ses paires des autres juridictions supérieures ? En dehors de ce décret de « confirmation » quelle est l’influence réelle du président de la République sur l’institution ? Ce qui naturellement tranchera la question de l’indépendance de la Cour. Empirique…)
2- En ce qui concerne la Cour des comptes. La Cour des Comptes est l’Institution supérieure de contrôle a posteriori des finances publiques (art. 162).
(Nul besoin de cette précision restrictive).
3- Lorsque la Cour des comptes requiert du Gouvernement des informations, des documents ou des explications se rapportant à l’exécution des lois de finances, celui-ci est tenu d’y répondre (162 al. 6).
(Pas que).
4- Relativement à la Cour spéciale de justice de la République (art. 163).
(Pour ma part, cette cour n’a pas grand intérêt si ce n’est un alourdissement institutionnel et une réponse à une pression morale et mimétique. Il faut en amont faire de l’effectivité de nos juridictions existantes une priorité. Et que tout le monde y soit soumis, y compris les membres du gouvernement. Quand au président, il répondrait après cessation de ses fonctions des crimes et délits. S’agissant de la haute trahison, qu’un comité ad ‘hoc issues des hautes juridictions se prononce.)
5- Définition du crime de haute trahison (art. 164).
(En ce qui concerne la violation du serment par le président, il me semble indispensable d’ajouter notamment comme haute trahison le fait de porter atteinte à l’unité et
- la cohésion nationales par des actes ou des paroles voire des décisions même implicites.
- (De la même manière nous n’avons pas besoin à chaque fois de faire référence à l’ethnie et à la région, la notion de discrimination suffira et sera sanctionnée comme telle. La République doit suffire.)
- En ce qui concerne la responsabilité relative à l’atteinte au maintien d’un environnement sain, il faut se demander de quel maintien parle-t-on ? Ce paragraphe est à retravailler. Je propose d’ailleurs plus concrètement que certains nos fleuves, forêts et réserves bénéficient de personnalité juridique et soient érigés en patrimoine national inviolable. Cf. com. point 5 du préambule Partie I.)
F- Les institutions d’appui à la gouvernance démocratique
1- La Commission nationale pour le développement a pour mission de contribuer à la définition des stratégies nationales et régionales de développement (art. 174).
- (Redondance avec des institutions déjà existantes notamment au sein du ministère du plan. C’est le cas entre autres de certaines missions des PDL…En sus, compte tenu de tout ce qu’on veut lui attribuer, une seule commission ne sera en rien efficace. Ce mélange entre questions d’engagement citoyen et gestion de ressources financières, le tout sur saisine pour in fine se contenter d’élaboration de rapports, ce n’est pas cela l’efficacité et encore moins une vision stratégique de planification si tant que l’on pense à cela.)
2- La Commission nationale pour le développement est obligatoirement saisie, pour avis, sur tout contrat sur les ressources minières, énergétiques, hydrauliques et environnementales avant sa signature ((art. 174 al. 3).