La Guinée, Terre Meurtrie : Le Cri Silencieux de Nos Forêts Disparues ( Par Mamadou Diouldé Sow)

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Il y a un cri que nous n’entendons pas, un cri qui pourtant résonne dans les profondeurs de la Terre, un cri étouffé sous le poids des arbres qui tombent. C’est le cri de la forêt guinéenne, de cette terre ancestrale qui meurt sous nos yeux, et pourtant, nous restons sourds à sa souffrance.

Dans le tumulte de nos vies, nous avons oublié ce qui nous donnait vie, ce qui nous permettait de respirer, d’exister.

 

La déforestation, cette violence sourde, est un poison que nous avons laissé s’infiltrer dans nos racines, dans le sang de notre patrie.

Nous l’avons vue venir, doucement, insidieusement, mais nous avons détourné le regard. Aujourd’hui, il est temps de faire face. Face à notre responsabilité, face à notre perte, face à la tragédie que nous avons provoquée.

 

Les arbres tombent, les âmes se meurent

 

Chaque arbre qui tombe, c’est une histoire qui s’efface. Ces géants de bois, qui depuis des siècles abritaient nos ancêtres, nous protègent encore de leurs ombres silencieuses. Mais nous avons décidé de les abattre, de raser ce qui a toujours été là, de croire que nous pouvions prospérer en détruisant nos racines. À chaque coup de hache, à chaque incendie, c’est un peu de notre âme collective qui se meurt.

 

Comment en sommes-nous arrivés là ? Nous avons cru que nous pouvions tout prendre sans jamais donner. Nous avons cru que le progrès, le modernisme, la technologie pouvaient remplacer cette nature qui a pourtant toujours veillé sur nous. Mais en détruisant nos forêts, nous nous détruisons nous-mêmes.

 

Le Fouta Djallon, autrefois verdoyant, est aujourd’hui une terre aride. Ses rivières, nourries par les pluies et les racines profondes des arbres, sont devenues de simples souvenirs. Les rivières se tarissent, les sols s’effondrent. C’est un écosystème entier, autrefois florissant, qui se meurt sous nos yeux. Et dans ce silence funèbre, que faisons-nous ? Nous continuons d’avancer, aveugles, sourds, insensibles.

 

Une planète en danger, une humanité en perdition

 

La déforestation n’est pas un simple acte local. C’est un cri d’alarme qui traverse les frontières, qui touche chaque être humain sur cette planète. Quand nous abattons nos forêts, nous ne détruisons pas seulement notre héritage guinéen, nous contribuons à un désastre planétaire. Les arbres que nous sacrifions en Guinée, c’est l’air que nous respirons qui se raréfie, c’est la température globale qui augmente, c’est la vie qui s’éteint.

 

Nous parlons du changement climatique comme d’un mal abstrait, une menace lointaine. Mais c’est ici, sur nos terres, que se joue cette bataille. La forêt n’est pas simplement un décor de verdure, c’est la source même de la vie. C’est elle qui absorbe le carbone, qui nous protège des tempêtes, qui régule les pluies. Sans elle, nous sommes seuls face aux colères du ciel.

 

Et ces colères se font déjà sentir. Les saisons se détraquent, les pluies inondent des villages, les sécheresses tuent les récoltes. Ce n’est plus une question de demain, c’est une urgence d’aujourd’hui. Chaque arbre abattu est une promesse brisée à nos enfants, une menace pour l’avenir de nos communautés.

 

Regardons-nous dans le miroir : avons-nous abandonné notre héritage ?

 

Nous avons hérité d’une terre fertile, de montagnes verdoyantes, de rivières étincelantes. Et que leur lèguerons-nous ? Un désert. Un sol stérile, incapable de nourrir, incapable de soutenir la vie. Nos ancêtres, eux, savaient la valeur d’un arbre. Ils plantaient pour l’avenir, pour les générations à venir, conscients que leur propre vie n’était qu’un chapitre dans l’histoire plus vaste de cette Terre.

 

Mais nous, que faisons-nous ? Nous coupons, nous brûlons, nous exploitons. Nous croyons que la terre nous appartient, que nous avons le droit de la modeler à notre convenance. Mais la vérité est que la Terre n’a jamais été à nous. Nous en sommes les gardiens, pas les propriétaires. Si nous ne changeons pas, si nous ne réapprenons pas à respecter cette nature qui nous entoure, nous n’aurons bientôt plus rien à garder.

 

Rebâtir nos forêts, reconstruire notre avenir

 

Il n’est pas trop tard. Chaque jour est une nouvelle chance, une opportunité de réparer les erreurs du passé. Nous pouvons replanter. Nous pouvons réapprendre à aimer et à protéger ce que nous avons trop longtemps considéré comme acquis. Il est temps de revenir à l’essentiel, de comprendre que l’arbre que nous coupons aujourd’hui est l’air que nous respirerons demain.

 

Des initiatives locales naissent. Des communautés se lèvent, refusant de laisser leurs terres devenir des cimetières de troncs abattus. Nous devons les soutenir, les amplifier. Le gouvernement, les entreprises, chaque citoyen a un rôle à jouer. Ce combat est le nôtre, il est collectif. Ce n’est pas simplement l’avenir des forêts qui est en jeu, c’est celui de nos enfants, de notre humanité, de cette planète.

 

Un cri d’alerte pour l’humanité

 

La déforestation, c’est l’effacement d’un héritage universel, d’une sagesse millénaire. Ce n’est pas seulement un crime contre la nature, c’est un crime contre l’humanité elle-même. Nous devons ressentir la douleur de chaque arbre tombé, car c’est notre propre existence que nous amputons à chaque coup de hache. La Terre crie, la forêt pleure, et nous devons répondre. Ce n’est pas une option, c’est une obligation morale.

 

Imaginez un monde où chaque Guinéen, chaque citoyen de cette planète, planterait un arbre au lieu de l’abattre. Un monde où la forêt renaîtrait de ses cendres, où les rivières retrouveraient leur cours, où l’air serait pur, où la vie, sous toutes ses formes, prospérerait à nouveau.

Ce rêve est à portée de main, mais il nécessite de chacun de nous un effort, un engagement, un amour renouvelé pour cette terre qui nous porte.

 

Conclusion : Le silence de la forêt, un écho dans nos âmes

 

La déforestation en Guinée n’est pas seulement un problème écologique. C’est un symbole de la crise existentielle que nous traversons tous. Nous avons perdu le contact avec la Terre, avec cette source de vie qui nous a tant donné. Mais nous avons encore le temps de retrouver notre chemin. Il est temps de répondre à l’appel de la forêt, de tendre la main à cette nature qui nous a si longtemps nourris et protégés. Ensemble, nous pouvons sauver ce qui reste. Ensemble, nous pouvons bâtir un avenir où l’homme et la nature ne feront plus qu’un.

 

La forêt nous appelle. Nous n’avons plus le luxe de l’ignorer.

 

Mamadou Dioulde Sow 

Coordinateur Préfectoral de la Maison des Associations et ONG de Guinée MAOG-PITA.