Accueil OPINION Le Thucydide américano-chinois peut-il être évité? (Par Goïkoya Kolié, juriste , Canada...
Le « piège de Thucydide » à ce concept développé par le politologue Graham T. Allison, qui s’inspire d’une observation faite par le philosophe grec Thucydide dans son œuvre « La Guerre du Péloponnèse ». Thucydide a noté que la montée en puissance d’Athènes a provoqué la peur et la réaction de Sparte, ce qui a conduit à un conflit inévitable. Le piège de Thucydide décrit donc la dynamique où une puissance émergente (dans ce cas, Athènes/Chine) menace de supplanter une puissance établie (Sparte/États-Unis), conduisant potentiellement à un conflit.
La Chine est devenue une puissance économique majeure, rivalisant avec les États-Unis dans plusieurs domaines, notamment le commerce, la technologie et l’influence géopolitique. Cette montée en puissance suscite des craintes aux États-Unis, qui voient leur position dominante menacée. En réponse à cette montée en puissance, les États-Unis ont engagé une série de mesures pour contenir l’influence de la Chine, allant des droits de douane à des restrictions sur les investissements et la technologie. Ces actions sont vues comme une tentative de préserver leur hégémonie économique et de contrer les ambitions de la Chine sur la scène mondiale.
Parallèlement, les États-Unis mènent également une campagne de dénigrement politique contre la Chine, soulignant des préoccupations sur les droits de l’homme, la transparence, et la sécurité nationale. Cela inclut des accusations de pratiques commerciales déloyales, de vol de propriété intellectuelle, et de menaces à l’ordre mondial. Cette stratégie vise à galvaniser l’opinion publique et à établir une coalition internationale contre les actions perçues comme agressives de la Chine. La combinaison de la compétition économique et du dénigrement politique a intensifié les tensions entre les deux pays, augmentant le risque d’un conflit, qu’il soit économique, militaire ou diplomatique. Le piège de Thucydide suggère qu’à mesure que ces tensions s’accroissent, le risque de malentendus et de conflits armés augmente également. Le piège de Thucydide est pertinent pour comprendre les relations contemporaines entre les États-Unis et la Chine, où la montée de la Chine en tant que puissance mondiale met à l’épreuve l’ordre établi dominé par les États-Unis, entraînant une dynamique qui pourrait potentiellement mener à des conflits.
Ce climat tendu pourrait entraîner l’humanité vers une troisième conflagration mondiale. Loin d’être une spéculation, cette préoccupation prend de l’ampleur à mesure que les tensions s’intensifient, notamment en raison de la surenchère des droits de douane entre les États-Unis et la Chine.
Prenons, par exemple, la guerre commerciale déclenchée par l’administration Trump en 2018, avec l’imposition de tarifs douaniers sur des centaines de milliards de dollars de produits chinois. Cette décision, justifiée par la nécessité de protéger l’industrie américaine et de corriger un déficit commercial monté à 419 milliards de dollars en 2018, a exacerbé les tensions. Les répliques de la Chine, qui a imposé ses propres tarifs sur des produits américains comme le soja et les voitures, montrent la profondeur de cette rivalité. Au-delà des simples échanges commerciaux, cette compétition s’étend à des domaines cruciaux tels que la fabrication de biens de consommation et les nouvelles technologies. La Chine, avec ses entreprises comme Huawei et BYD, a pris de l’avance dans le secteur des technologies numériques, de l’électronique et des énergies renouvelables. Par exemple, BYD est devenu un acteur majeur dans le domaine des batteries et des véhicules électriques, défiant les géants américains comme Tesla. Alors que les États-Unis tentent de revitaliser leur propre industrie, leur position sur le marché mondial est mise à mal.
Historiquement, cette rivalité rappelle les tensions qui ont précédé la Première et la Seconde Guerre mondiale, où des puissances en déclin ont lutté pour maintenir leur hégémonie face à des rivales montantes. Les États-Unis, ressentant leur position de leader économique menacée, semblent tirer désespérément sur les ficelles du protectionnisme et de l’isolement, une stratégie qui a des répercussions non seulement sur leur propre économie exsangue, mais aussi sur l’ensemble de l’économie mondiale. En fin de compte, alors que les nations s’alignent et que les alliances se redéfinissent, la question demeure : sommes-nous à quelques centimètres d’une guerre mondiale? Si la rivalité continue d’escalader sans une diplomatie efficace, les conséquences pourraient être catastrophiques, non seulement pour les États-Unis et la Chine, mais pour l’humanité tout entière. La peur d’un conflit ouvert, alimenté par des nationalismes croissants et des intérêts économiques divergents, pourrait devenir une réalité tangible, mettant en péril des décennies de paix relative.
Chronologie de provocation américaine.
La guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine a connu plusieurs phases distinctes depuis son déclenchement en 2018, avec une intensification particulièrement marquée en 2025 lors du retour de Donald Trump à la présidence américaine.
Les premières salves sont tirées le 6 juillet 2018 lorsque l’administration Trump impose des droits de douane de 25% sur 34 milliards de dollars de produits chinois, principalement des biens industriels et des équipements technologiques. La réaction chinoise est immédiate et symétrique : Pékin applique le même jour des tarifs identiques de 25% sur un montant équivalent de produits américains, ciblant délibérément des secteurs sensibles comme le soja et l’automobile. Cette riposte frappe particulièrement les États agricoles américains, bastions électoraux de Trump. L’escalade se poursuit rapidement. Dès le 23 août 2018, Washington étend les mesures protectionnistes à 16 milliards de dollars supplémentaires d’importations chinoises, touchant cette fois des produits électroniques et des matières plastiques. La Chine répond dans les 24 heures avec des mesures strictement équivalentes sur les hydrocarbures et produits chimiques américains. Le véritable tournant intervient le 24 septembre 2018 lorsque les États-Unis annoncent des taxes de 10% sur 200 milliards de dollars de marchandises chinoises, taux qui sera porté à 25% en mai 2019 après l’échec des négociations. Face à cette offensive, Pékin déploie une stratégie plus nuancée mais tout aussi efficace, imposant des droits progressifs jusqu’à 25% sur 60 milliards de dollars de produits américains.
La présidence Biden maintient et même renforce certaines mesures. En juin 2021, l’administration démocrate introduit des tarifs de 25% sur les semi-conducteurs chinois et 15% sur les panneaux solaires. La Chine réplique un mois plus tard avec des taxes de 30% sur les véhicules américains et 20% sur les produits agricoles. En 2023, Washington accentue encore la pression avec des droits de 50% spécifiquement ciblés sur les batteries lithium-ion chinoises, un secteur jugé stratégique.
L’année 2025 marque un tournant décisif dans le conflit commercial. Dès son investiture en janvier, le président Trump lance une offensive sans précédent. Le 6 février, il décrète des droits de douane de 60% sur les véhicules électriques chinois, contre seulement 25% auparavant. Le 1er mars, de nouvelles mesures frappent l’acier (50%) et les puces électroniques (100%). L’apogée intervient le 15 avril avec l’instauration d’une surcharge globale de 165% sur 145 milliards de dollars de produits technologiques chinois, incluant les équipements 5G et les solutions d’intelligence artificielle.
La réponse chinoise est à la fois rapide et calculée. Dès le 7 février, Pékin impose une taxe prohibitive de 125% sur les avions Boeing. Le 20 mars, ce sont les exportations agricoles américaines qui sont durement touchées, avec des droits de 80% sur le soja et 70% sur le gaz naturel liquéfié. La mesure la plus lourde de conséquences intervient le 1er mai : un embargo partiel sur les terres rares assorti de droits de douane de 200% pour les exportations vers les États-Unis, privant ainsi l’industrie high-tech américaine de matériaux essentiels.
Les conséquences économiques de cette escalade sont profondes mais asymétriques. Aux États-Unis, l’inflation atteindra 9,3% en juin 2025 selon le Bureau of Labor Statistics, tandis que 450 000 emplois industriels disparaissent au cours du deuxième trimestre. Les exportations agricoles vers la Chine s’effondrent de 40%, mettant à genoux de nombreuses exploitations familiales. La Chine enregistre pour sa part un ralentissement de sa croissance à 3,8% contre 5,2% en 2024, avec des pertes estimées à 85 milliards de dollars dans le secteur électronique. Mais Pékin parvient à compenser partiellement ces effets par une augmentation de 60% de ses exportations vers la Russie et le Moyen-Orient.
Au final, malgré des dommages réciproques, la balance penche en faveur de la Chine. L’économie américaine, bien que plus résiliente qu’en 2018, reste vulnérable en raison de sa dépendance persistante aux composants chinois – près de 70% des batteries pour véhicules électriques proviennent encore de Chine en 2025. Les tentatives de relocalisation de la production se heurtent à des difficultés techniques et des délais imprévus. Les contre-mesures chinoises, particulièrement bien ciblées sur les points faibles américains comme l’aéronautique et l’agriculture, révèlent une compréhension fine des fractures internes aux États-Unis.
La Chine dispose quant à elle d’atouts décisifs : le contrôle quasi monopolistique de certaines chaînes d’approvisionnement critiques (terres rares, principes pharmaceutiques actifs) et un marché intérieur qui atteint 6000 milliards de dollars en 2025. Ces facteurs, combinés à une stratégie de diversification commerciale agressive, lui permettent de conserver une marge de manœuvre que les sanctions américaines ne parviennent pas à entamer durablement. Le conflit commercial révèle ainsi les limites du pouvoir de coercition économique des États-Unis face à une Chine devenue trop intégrée dans l’économie mondiale pour être isolée efficacement.
Le déclin de la balance commerciale américaine : la faute aux chinois?
De nombreux intellectuels, tels que Caroline Galactéros, Jacques Sapir, ou le journaliste Régis Le Sommier, ainsi que des penseurs de diverses régions du monde, partagent l’idée que le déficit commercial américain résulte en grande partie de la cupidité des hommes d’affaires et des industriels américains, ainsi que d’une politique de désindustrialisation et de délocalisation des industries vers la Chine. Cette tendance a été exacerbée depuis les années 1990, lorsque les entreprises américaines ont commencé à transférer leurs capacités de production vers la Chine, attirées par des coûts de production faibles et une main-d’œuvre bon marché.
Des économistes comme Jeffrey Sachs, ancien conseiller spécial auprès des Nations Unies, ont également souligné que cette délocalisation a conduit à l’exploitation des travailleurs chinois dans des conditions difficiles. Les entreprises américaines ont souvent été complices de ce système, profitant des exigences de transfert de technologie imposées par les autorités chinoises pour faire de la Chine « l’usine du monde ». Cette dynamique a non seulement affaibli l’industrie manufacturière américaine, mais a aussi contribué à un processus de désindustrialisation qui a laissé des millions de travailleurs américains sans emploi.
Des intellectuels d’autres régions, comme le sociologue sud-africain Imraan Buccus et l’économiste indonésien M. Chatib Basri, soutiennent également ces thèses, affirmant que les États-Unis ont sous-estimé les conséquences à long terme de leur politique commerciale. De plus, des analystes européens comme Thomas Piketty, qui a examiné les inégalités économiques, et Branko Milanovic, spécialiste de la mondialisation, mettent en lumière les effets dévastateurs de la délocalisation sur les classes ouvrières et moyennes, tant aux États-Unis qu’en Europe. Ces intellectuels jugent que le président Trump a tort d’accuser la Chine, l’Europe et le reste du monde d’être responsables de son déficit commercial. Ils soulignent que si les États-Unis sont aujourd’hui incapables d’exporter, c’est en grande partie parce qu’ils n’en ont plus les moyens. Cela inclut une perte d’industries, de compétences, de savoir-faire, et un environnement économique inadapté, marqué par des taxes élevées qui découragent la réindustrialisation. Cette analyse commune met en lumière un consensus parmi de nombreux scientifiques, économistes, chercheurs et journalistes qui estiment que la véritable responsabilité du déficit commercial américain repose sur des choix stratégiques internes, plutôt que sur des facteurs externes.
Le fameux déficit de la balance commerciale américaine.
La balance commerciale des États-Unis, qui mesure la différence entre les exportations et les importations de biens et de services, a connu des fluctuations significatives au cours du XXe siècle et au début du XXIe siècle. Après la Première Guerre mondiale, les États-Unis étaient en position de force économique. Sa balance commerciale était excédentaire, avec des exportations supérieures aux importations, en raison de la demande mondiale pour les produits américains. Les États-Unis exportaient principalement des produits agricoles (comme le blé, le maïs et le coton), des machines, du matériel de transport (comme des automobiles) et des produits manufacturés. Ses importations comprenaient des produits agricoles (comme le café et le sucre), des matières premières et des biens d’équipement.
La Grande Dépression qui a frappé l’économie mondiale, et les États-Unis ont adopté des politiques protectionnistes, comme le Tariff Act de 1930. Cela a entraîné une baisse des importations et des exportations, mais la balance commerciale est restée relativement équilibrée, bien que les exportations aient chuté. Avant l’entrée des États-Unis dans la Seconde Guerre mondiale, sa balance commerciale était à nouveau positive, principalement en raison de l’augmentation des exportations militaires. Pendant la guerre, les États-Unis ont produit de nombreux biens pour soutenir les alliés. : Pendant cette, ses exportations militaires ont pris de l’importance, avec des fournitures militaires, des avions, des véhicules et des équipements militaires. Les exportations de biens de consommation ont également repris après la guerre. Les importations pendant la guerre étaient principalement des matières premières, essentiellement en provenance des enclos esclavagistes européens d’Afrique, d’oû l’Amérique s’accapare de l’uranium qui servira fabrication des bombes nucléaires larguées sur Nagasaki et Hiroshima. Après la guerre, la balance commerciale américaine a continué de lui être favorable, car les États-Unis ont dominé l’économie mondiale, et ses exportations ont largement dépassé les importations. Cela a été une période de forte croissance économique. La balance commerciale est restée positive dans les années, bien que des signes de déséquilibre aient commencé à apparaître à la fin de la décennie, avec une augmentation progressive des importations, notamment en raison de la croissance des économies européennes et japonaises. Dans années 1970, la balance commerciale américaine a commencé à fléchir de manière plus significative. Les chocs pétroliers de 1973 et 1979 ont eu un impact sur l’économie américaine, entraînant une hausse des importations d’énergie et une augmentation du déficit commercial dans les secteurs non énergétiques. Dans les années 1980, la balance commerciale de l’Oncle Sam est devenue carrément déficitaire pour la première fois, marquant un tournant dans l’histoire économique des États-Unis. Les importations ont continué d’augmenter, notamment en raison de la montée de la concurrence étrangère du Japon et des pays émergents. Le déficit commercial des États-Unis a continué de se creuser dans les années 1990, atteignant des niveaux record. Cela a été exacerbé par l’ouverture des marchés, la délocalisation des industries américaines vers la Chine, la mondialisation et l’accroissement des importations de biens de consommation. Le déficit commercial américain a atteint un niveau sans précédent dans les années 2000, avec des importations largement supérieures aux exportations. La montée en puissance de la Chine comme puissance manufacturière a également joué un rôle clé dans l’aggravation du déficit.
Potentiels impacts militaires du piège de Thucydide.
Des implications militaires potentielles peuvent affecter non seulement les deux nations, mais aussi la stabilité régionale et mondiale puisque des conséquences militaires désastreuses pourraient découler de cette rivalité. Celles-ci partent de l’augmentation des dépenses militaires dans un climat de tensions croissantes entre les États-Unis et la Chine, incitant les deux pays à accroître leurs budgets de défense. La Chine a déjà connu une augmentation significative de ses dépenses militaires au cours des deux dernières décennies, visant à moderniser ses forces armées, à développer de nouvelles technologies et à étendre sa présence maritime. Les États-Unis, de leur côté, renforcent leurs capacités militaires dans la région Asie-Pacifique pour prétendument contrer cette montée en puissance. Cette rivalité accrue entraîne d’ors et déjà une course aux armements, avec un accent particulier sur des technologies militaires avancées telles que les drones, les systèmes de cyber défense, les missiles hypersoniques et les capacités spatiales. La Chine investit massivement dans le développement de missiles antinavires et des systèmes de défense aérienne qui menacent la domination navale des États-Unis dans la région. Les tensions en mer de Chine méridionale et en mer de Chine orientale, où la Chine revendique des territoires contestés, pourraient dégénérer en conflits ouverts. Les États-Unis, qui soutiennent leurs alliés dans la région, comme le Japon et les Philippines, pourraient s’impliquer dans des confrontations militaires si des incidents surviennent, tels que des affrontements entre navires ou des incursions dans l’espace aérien. La rivalité pourrait également redéfinir les alliances militaires. Les États-Unis chercheraient à renforcer leurs partenariats avec des pays de la région, comme l’Inde, l’Australie et le Japon, pour contrer l’influence croissante de la Chine. Les exercices militaires conjoints, comme le Quad (Dialogue de sécurité quadrilatéral entre les États-Unis, l’Inde, le Japon et l’Australie), sont des exemples de cette dynamique scabreuse de veilles de déflagration mondiale.
La rivalité américano-chinoise pourrait se traduire par une intensification des cyberattaques. Les deux pays disposent de capacités sophistiquées dans le domaine de la cyberdéfense et de la cyberguerre. Des attaques contre des infrastructures critiques, des systèmes militaires ou des réseaux de communication pourraient devenir une méthode courante de confrontation sans déclencher une guerre ouverte. Les tensions militaires pourraient également entraîner des erreurs de calcul, où des mouvements perçus comme agressifs pourraient être mal interprétés, conduisant à une escalade rapide des hostilités. Un incident maritime dans une zone contestée pourrait fort bien dégénérer en un conflit armé, si les deux parties ne parviennent pas à gérer la situation avec prudence. La rivalité entre les États-Unis et la Chine pourrait également avoir des implications pour la sécurité mondiale. D’autres pays pourraient être entraînés dans le conflit, et les tensions pourraient affecter des régions éloignées, exacerbant des conflits existants ou en créant de nouvelles tensions. Les organisations internationales comme les Nations Unies pourraient être mises à l’épreuve, et la coopération en matière de sécurité mondiale en pâtirait.
La Chine, nouvelle puissance hégémonique : une domination techno-industrielle sans équivalent dans l’histoire moderne.
L’ascension fulgurante de la Chine sur la scène technologique mondiale constitue un phénomène sans précédent qui redéfinit les équilibres géostratégiques contemporains. Cette métamorphose, souvent sous-estimée par les observateurs occidentaux, s’appuie sur des réalisations concrètes qui défient l’imagination et réduisent à néant les prétentions hégémoniques américaines.
Il faut souligner que le génie civil chinois réécrit les lois de la physique architecturale. Dans les montagnes escarpées du Guizhou, le pont de Duge enjambe la vallée de Beipanjiang à 625 mètres de hauteur, soit l’équivalent de deux tours Eiffel superposées. Ce colosse d’acier, érigé pour 2,3 milliards de dollars, symbolise l’audace chinoise là où les ingénieurs occidentaux reculent. Le réseau ferroviaire à grande vitesse, quant à lui, forme une toile d’acier de 45 000 km parcourue par des trains filant à 350 km/h – distance qui permettrait de relier Paris à Pékin cinq fois sans interruption. L’Occident, englué dans ses lourdeurs administratives, n’a su construire que 735 km de lignes comparables aux États-Unis.
L’industrie manufacturière chinoise est aujourd’hui perçue comme une machine de guerre économique imbattable. L’usine géante de BYD à Chongqing couvre 130 km², surpassant la superficie totale de San Francisco. Dans cet antre industriel sortiraient chaque année 2 millions de véhicules électriques, soit un toutes les quinze secondes. À Zhengzhou, l’usine Foxconn baptisée « iPhone City » crache quotidiennement 1,3 million de smartphones – de quoi équiper l’ensemble de la population française en moins de deux mois. Ces chiffres vertigineux rendent obsolètes les standards occidentaux de production.
La Chine, c’est aussi une révolution énergétique et technologique insolente. Le réacteur au thorium de Wuwei, fruit d’un investissement de 3 milliards de dollars, représente une avancée nucléaire majeure avec des déchets cent fois moins dangereux que les centrales traditionnelles. Dans le domaine des semi-conducteurs, SMIC a réussi l’exploit de produire des puces à 3 nanomètres malgré l’embargo occidental sur les machines lithographiques néerlandaises – un camouflet pour les stratégies de containment américaines.
La Chine ose même une suprématie aérospatiale et défensive. L’armée chinoise déploie désormais un million de drones militaires annuellement, incluant des micro-drones supersoniques indétectables. Le chasseur furtif J-20, d’un coût unitaire de 120 millions de dollars, surclasse techniquement le F-35 américain selon les analyses de la Rand Corporation. Dans le civil, les jets hypersoniques de la China Aerospace Science and Industry Corporation (CASIC) prévus pour 2025 promettent de relier Shanghai à Los Angeles en trois heures seulement, alors que cette distance est actuellement de 11 à 12 heures.
La Chine forme 1,2 million d’ingénieurs par an – trois fois le chiffre américain – alimentant un système d’innovation en circuit fermé. DeepSeek, fleuron de l’IA chinoise, surpasse désormais OpenAI dans le traitement des langues non-anglaises avec un budget pourtant inférieur. Les 1,8 million de brevets déposés annuellement par la Chine représentent 70% du total mondial, asphyxiant progressivement les concurrents occidentaux.
Au niveau environnemental, la Chine interpelle la conscience écologique de toute la planète, alors que l’Occident se contente de discours sur le retour au vélo, l’empire du milieu a planté 66 milliards d’arbres depuis 2000 – l’équivalent de 2,5 arbres par habitant chaque année. Le désert de Kubuqi a reculé de 40% grâce à des techniques de phytoremédiation révolutionnaires. Ces réalisations concrètes contrastent avec les déclarations d’intention américaines et européennes sur le climat.
Les chiffres du développement de la Chine qui donnent le vertige au président Trump.
Le pays de Mao Zedong représente aujourd’hui 53% de la production mondiale d’acier, 65% du marché des véhicules électriques, 80% des smartphones produits, 95% des terres rares extraites, 12% des transactions pétrolières en yuan. L’économie chinoise, évaluée à 34 000 milliards de dollars en parité de pouvoir d’achat, dépasse désormais les États-Unis (28 000 milliards) et l’Union européenne (25 000 milliards). Cette suprématie s’appuie sur 8 000 milliards de dollars investis en infrastructures depuis 2008 – six fois le budget américain équivalent. Ceci démontre l’échec des stratégies occidentales de containment. Les sanctions américaines n’ont fait qu’accélérer l’autosuffisance chinoise. Huawei, privé d’accès aux puces TSMC, a développé ses propres solutions. Le yuan représente désormais 12% des réserves mondiales de change. La dette américaine détenue par Pékin (1 000 milliards de dollars) constitue une arme géopolitique redoutable. Face à cette démonstration de puissance systémique, l’Occident doit cesser son hypocrisie droit-de-l’hommiste moraliste. Les 65 milliards d’euros annuels de subventions agricoles européennes ou les 12 milliards de dollars injectés dans Boeing prouvent que le protectionnisme n’est pas l’apanage chinois. La différence réside dans l’efficacité : là où l’Occident disperse ses moyens, la Chine concentre ses efforts avec une détermination sans faille.
Depuis des années, les États-Unis et l’Europe dénoncent avec véhémence les subventions chinoises à ses industries stratégiques, les qualifiant de « distorsion du marché ». Pourtant, une analyse objective des politiques économiques occidentales révèle une réalité bien différente : un protectionnisme tout aussi massif, mais bien moins efficace. La réalité est que l’Occident subventionne, mais en cachette. En 2022, l’administration Biden a fait voter l’Inflation Reduction Act (IRA), un plan de 370 milliards de dollars destiné aux énergies vertes, aux batteries électriques et aux véhicules propres. Dans le même temps, en vertu de la Loi sur les puces électroniques (CHIPS) et la science a facilité l’injection de 52 milliards de dollars dans les semi-conducteurs américains pour contrer la domination chinoise. Ces sommes colossales, bien plus concentrées que les aides chinoises, visent explicitement à rattraper le retard technologique des États-Unis face à Pékin. L’Europe n’est pas en reste. Airbus, fleuron aéronautique européen, bénéficie depuis des décennies d’aides d’État déguisées en « prêts remboursables », tandis que Berlin a offert des milliards d’euros en subventions pour attirer l’usine Tesla Gigafactory en Allemagne. Sans oublier les 750 milliards d’euros du plan de relance post-Covid, largement orientés vers les industries stratégiques.
La Chine subventionne, mais avec une efficacité redoutable, car contrairement aux dépenses occidentales souvent diluées dans des projets bureaucratiques, la Chine cible ses investissements avec une précision chirurgicale. Entre 2015 et 2025, Pékin a injecté plus de 300 milliards de dollars dans les énergies renouvelables, faisant du pays le leader mondial des panneaux solaires, des éoliennes et des batteries lithium-ion. Aujourd’hui, 75% des batteries électriques mondiales sortent d’usines chinoises, et 80% des panneaux solaires installés en Europe sont fabriqués en Chine. Dans les semi-conducteurs, alors que les États-Unis tentent péniblement de relancer leur production avec le CHIPS Act, la Chine a déjà construit 23 nouvelles fonderies en trois ans, malgré les sanctions. SMIC, son champion national, produit désormais des puces en 5 nm sans avoir besoin des machines ASML néerlandaises – une prouesse que beaucoup jugeaient impossible.
L’accusation de « subventions déloyales » portée contre la Chine repose sur une hypocrisie flagrante qui peine à attirer la sympathie du Sud Global. Quand l’Europe subventionne Airbus, c’est pour « préserver l’emploi ». Quand les États-Unis injectent des milliards dans Intel et TSMC, c’est pour « sécuriser les chaînes d’approvisionnement ». Mais quand la Chine fait de même pour BYD ou Huawei, c’est soudainement « du dumping ». La réalité est simple : toutes les grandes puissances subventionnent leurs champions industriels. La seule différence, c’est que la Chine le fait mieux, plus vite, et avec des résultats tangibles. Alors que l’Occident tergiverse entre régulations et lourdeurs administratives, pendant que Pékin avance. Le discours moralisateur sur les « pratiques déloyales » de la Chine ne sert qu’à masquer l’échec des politiques industrielles occidentales. Les États-Unis et l’Europe dépensent des centaines de milliards, mais sans la même vision à long terme. Résultat : malgré l’IRA, le CHIPS Act et les aides européennes, la Chine continue de dominer les secteurs clés – des batteries aux trains à grande vitesse, en passant par l’intelligence artificielle. La question n’est plus de savoir si la Chine subventionne ses industries, mais pourquoi l’Occident, malgré ses propres subventions massives, ne parvient pas à rivaliser. La réponse est peut-être à chercher du côté de l’efficacité, de la planification, et surtout, de l’absence de contradictions politiques qui paralysent Washington et Bruxelles. La guerre économique est lancée. Et pour l’instant, la Chine mène. Cette analyse factuelle, étayée par les données du FMI, de la Banque Mondiale et du China Power Project, ne laisse place à aucun doute : le siècle asiatique a commencé, et son épicentre se situe résolument dans la Chine communiste plutôt qu’à Washington. La question n’est plus de savoir si la Chine dominera le XXIe siècle, mais comment l’Occident pourra s’adapter à cette nouvelle réalité géoéconomique irréversible.
Par Goïkoya Kolié, juriste , notre collaborateur